Types d’ouvrage
Situé en contrebas de Fourvière, enclavé sous la place Benoît Crépu entre le quai Fulchiron et l’église Saint Georges, dans le 5ème arrondissement de Lyon, le parking souterrain Saint Georges, réalisé pour le compte de Lyon Parc Auto, offrira à terme 700 places de stationnement sur 6 niveaux à la porte d’entrée du Vieux Lyon.
Dans le cadre de ce projet ambitieux, Lyon Parc Auto a confié à Spie Batignolles Fondations la réalisation des travaux de fondations spéciales en paroi moulée, travaux qui ont débuté en octobre 2001 pour s’achever six mois plus tard.
L’intervention de Spie Batignolles Fondations s’est déroulée dans un contexte et un environnement urbain complexes, compte tenu du positionnement du projet sur un axe majeur de circulation de l’agglomération lyonnaise et de la proximité de bâtiments d’habitation datant de plus de 400 ans.
Les dimensions de ce projet sont telles (120 m de long, 30m de large, 22m de profondeur) qu’on peut parler de grande fouille urbaine dont le creusement nécessitera d’aller chercher le substratum à grande profondeur, en traversant un environnement géologique très délicat de par la présence de sols remaniés d’origine granitique (arènes) et de la proximité de la Saône.
Sur le site de construction de l’ouvrage, il a été mis en évidence la succession des terrains suivants :
L’une des particularités géologiques du site réside notamment dans la grande variation du niveau du toit de la couche des arènes granitiques, de la cote 154 IGN69 en extrémité sud du projet à la cote 147 IGN69 en extrémité nord.
Quant à la nappe phréatique, elle est en relation directe avec la Saône, pour un niveau variant de 163,20 IGN69 en eaux quasi permanentes à la cote 166,16 IGN69 pour la crue exceptionnelle.
La définition exacte du projet a nécessité, au cours de la phase de préparation du chantier, la réalisation d’une reconnaissance de sols complémentaire axée sur la définition des caractéristiques du faciès des arènes granitiques.
L’ensemble des résultats de ces essais a permis de définir l’importance de l’ancrage profond de la paroi moulée dans cette couche des arènes granitiques, en assurant la stabilité du fond de fouille (boulance) et la limitation des débits d’exhaure.
Le diagnostic archéologique préalable aux travaux de gros œuvre, réalisé en 1998, n’avait pas pu, en raison de la complexité du site (voiries en circulation, nombreux réseaux enterrés, nappe phréatique très haute, espaces publics à préserver), évaluer avec suffisamment de précision la nature et l’importance stratigraphique du site concerné par les travaux du parc de stationnement.
La colonie lyonnaise, fondée en 43 avant Jésus-Christ, principalement implantée sur la colline de Fourvière et les pentes de la Croix Rousse, a connu une occupation humaine progressive des berges de Saône. Cette occupation des berges a été liée à l’évolution du cours des fleuves et à celle du confluent Rhône / Saône. A partir de la fin du IIIème siècle de notre ère, le centre de la cité s’est déplacé de Fourvière vers l’actuel quartier Saint-Jean, en rive droite de la Saône. A la fin du Moyen-Age, le site concerné par le parc de stationnement est localisé à l’emplacement de l’ancien port Sablé, siège d’un important trafic fluvial.
Il était donc prévu qu’après réalisation des parois moulées, les archéologues de l’INRAP (Institut national d’archéologie préventive) effectuent une fouille archéologique préventive exhaustive de l’emprise de l’ouvrage, jusqu’à une profondeur pouvant atteindre 8m à 10m (intervention programmée au minimum sur 13 mois, avec la possibilité d’aller jusqu’à 20 mois en phase optionnelle). Aux entreprises titulaires des lots terrassements et gros-œuvre de tenir compte de cette contrainte de phasage liée à l’exécution des fouilles archéologiques pour mettre au point leurs propres méthodes d’exécution.
La solution technique qui a été retenue a consisté en la réalisation d’une enceinte périmétrique en paroi moulée de 82 cm d’épaisseur, sur 300 m de long, et de 20 barrettes centrales, de 62 cm d’épaisseur, servant, en complément de la paroi moulée, d’appuis et de fondations à l’infrastructure du parking.
Le fond de fouille étant établi à la cote 144,85 IGN69, l’excavation des parois moulées a recoupé les horizons durs délimités par les arènes granitiques sur une hauteur variant de 10 à 17 m.
Le forage dans les terrains durs a représenté ainsi en moyenne 50% de la surface totale de forage réalisée pour le projet.
Par ailleurs, l’exécution d’une telle fouille, en mitoyenneté de bâtiments très anciens et du mur de quai de la Saône, a imposé de définir un mode opératoire spécifique de forage limitant considérablement les largeurs d’excavation des panneaux, dans un soucis de respect d’un environnement très sensible aux déplacements éventuels du terrain.
La stabilité du soutènement est assurée, au fur et à mesure de l’avancement du terrassement de la fouille, niveau après niveau, par la mise en oeuvre des poutres en béton armé de l’infrastructure résistante du parking, établies selon un espacement de 5m.
Parallèlement le projet devait prendre en compte :
Les phasages
Pour tenir compte de ces contraintes fortes imposées au projet, il a fallu élaborer et mettre en oeuvre une programmation et un phasage spécifique des travaux vis-à-vis du maintien de la circulation et de la présence du collecteur d’assainissement (calepinage adapté des panneaux de la paroi moulée, emprises de chantier phasées…).
Il a fallu également définir une solution technique qui permette de modifier, pendant la durée d’intervention des archéologues, le principe de butonnage retenu pour la structure en phase de service, ceci pour optimiser le déroulement des travaux de fouilles archéologiques sous gabarit.
Spie Batignolles Fondations, s’appuyant sur sa grande expérience des projets complexes et sur les compétences de son personnel en terme d’organisation de chantiers et de définition de solutions techniques et matérielles, a pu répondre à l’ensemble de ces contraintes fortes imposées au projet, en association avec l’ensemble des intervenants (Maîtrise d’ouvrage, Maîtrise d’œuvre, bureaux d’études et de contrôle) pour la réussite de ce challenge.
Le projet a donc débuté par une longue phase de préparation et de mise au point, pour permettre, pendant toute la durée des travaux de parois moulées :
Le phasage de réalisation des travaux de parois moulées a donc été effectué en découpant longitudinalement l’emprise du projet, permettant ainsi de définir deux zones distinctes pouvant être utilisées alternativement soit comme zone d’activité des travaux, soit comme aire de circulation.
Le fait de travailler selon ce découpage du projet en deux zones distinctes a limité également de façon considérable l’emprise du chantier réservée pour l’évolution des engins et pour le stockage du matériel.
Dans ce contexte sensible, il s’avérait indispensable, pour le respect des délais et du bon déroulement de la programmation et de l’enchaînement des travaux, de ne pas multiplier les temps de déplacements et de réaménagement des installations fixes de la centrale de fabrication et de recyclage des boues de forage
En accord avec l’ensemble des intervenants, il a été convenu d’installer la centrale à boue, pendant toute la durée des travaux, entre les voies de circulation côté quai et l’église Saint Georges, sur une emprise de 5 mètres de largeur pour 15 m de longueur (voir photo n°1: installation de la centrale à boue).
Cette installation se trouvant ainsi entièrement à l’extérieur de l’emprise même des travaux, cela a permis de ne pas aggraver la situation au niveau de la zone de travail effectif.
Des aménagements spécifiques (passages de conduites sous les chaussées) ont dû être réalisés pour permettre la circulation des boues de forage entre la centrale et la zone de travail. Les travaux ont alors débuté, pour la période d’octobre à décembre 2001, sur la partie Ouest du projet, puis, de janvier à fin mars 2002, sur la partie Est après les opérations de dévoiement de la chaussée.
La paroi moulée
La plateforme de forage a été livrée, après enlèvement de l’ensemble du mobilier urbain, à la cote 166,00 IGN69, le parking étant implanté sous la place benoît Crépu, entre les bâtiments existants et le mur de quai en maçonnerie.
La paroi moulée forme une enceinte de 300m de pourtour, constituée de panneaux de 5 mètres de largeur en zone courante, de 82cm d’épaisseur et de 28 mètres de profondeur. Pour établir le découpage suivant le linéaire de l’enceinte (plan de panneautage), il a fallu tenir compte des limites des différentes emprises liées au phasage, mais aussi de la présence du collecteur existant.
Chacun des panneaux de paroi moulée a été équipé de joints plats water stop.
Les panneaux ont été équipés en une seule fois de cages d’armatures de 25 mètres de hauteur munies d’importants renforts en armatures au droit des liaisons avec les futurs butons en béton armé.
A titre indicatif, les études de dimensionnement conduisent à des efforts de compression maximale dans ces poutres supérieurs à 350 tonnes.
Les barrettes centrales
Les barrettes de fondations intérieures ont été implantées dans l’axe longitudinal du parking et présentent les dimensions suivantes :
Ces barrettes servent d’appui à l’infrastructure du parking et, à chaque niveau du parking, sont liaisonnées avec les poutres butonnantes en béton armé.
Le suivi acoustique
Compte tenu de l’environnement urbain du projet, le maître d’ouvrage a souhaité “ un chantier silencieux ” et a demandé à l’entreprise de se conformer au Cahier des Charges qu’il avait demandé à son consultant en acoustique d’élaborer en fonction de la configuration du site et de son état initial avant tous travaux.
Le chantier a donc été instrumenté et un suivi a été effectué pendant toute la durée des travaux de parois moulées, grâce à un dispositif de mesures acoustiques mis en œuvre par le Cabinet SYNESTHESIE ACOUSTIQUE en façade des bâtiments d’habitation (micro installé à 2m du chantier et à 3,5m de hauteur).
Le suivi continu des mesures a permis de tracer en instantané une courbe du bruit pendant les opérations de forage. Ce dispositif avait pour objectif de surveiller les niveaux de bruit et permettait également, suite à un étalonnage du système sur chacun des engins et matériels du chantier, de pouvoir identifier précisément, en cas de dépassement des seuils, les sources dites bruyantes.
La campagne de mesures a permis de vérifier la justesse des prévisions de la société Synesthésie Acoustique, laquelle avait pronostiqué un niveau sonore de 78 dB(A), après étalonnage sur un chantier similaire. En effet, le niveau sonore mesuré pendant cette phase de travaux (la plus bruyante) est supérieur de 5 dB(A) au niveau sonore ambiant, qui est de 73 à 74 dB(A).
La méthode observationnelle – Suivi des déplacements des ouvrages mitoyens
Dans le cadre du projet, à la demande du client, il a été convenu de mettre en œuvre des cibles de mesure pour le suivi des déplacements des bâtiments anciens mitoyens à la fouille.
Ces mesures se justifiaient en effet par le fait que les archéologues devaient effectuer leurs recherches à l’intérieur de l’enceinte du parking, lors d’une première phase de fouille archéologique réalisée côté Saône sur la longueur totale du parking (profondeur : 8 mètres ; largeur : 6 mètres).
Les études de dimensionnement menées par Spie Batignolles Fondations ont permis de définir une solution prenant en compte cette contrainte, en mettant en œuvre un dispositif de butonnage réduit.
Afin de vérifier les hypothèses prises en compte dans ce phasage spécifique et délicat, Spie Batignolles Fondations a proposé, en complément du suivi des bâtiments, de mettre en œuvre la méthode observationnelle au droit de l’ouvrage du mur de quai à partir de cibles à l’espacement de 10m sur le mur de quai et sur la tête de la paroi moulée.
Les critères de cette méthode ont été établis avec l’ensemble des intervenants pour aboutir à la définition de valeurs seuils de déplacements et de mesures conservatoires associées.
Une des nombreuses mesures prévoyait de noyer la fouille de 8 m de profondeur dans le cas d’une remontée du niveau de la Saône au-delà du niveau des eaux quasi permanentes, mesure qu’il n’a été nécessaire d’appliquer.
Les travaux de purges considérables
La réalisation des travaux de parois moulées et de barrettes a été rendue particulièrement difficile du fait de la présence dans le sol de nombreux obstacles, que ce soit dans les couches supérieures ou en profondeur. C’est ainsi qu’il a été nécessaire d’effectuer d’énormes travaux de purges préalablement à la réalisation des murettes guides. Lors du forage des barrettes ou des panneaux de parois moulées, de nombreux vestiges, en bois, béton ou en maçonneries, ont été remontés à la surface (voir photo n°2: remontée de la base d’un pieu en bois).
Les difficultés rencontrées lors des travaux, à cause de la rencontre de ces obstacles, ont été validées, a posteriori, par les découvertes importantes qu’ont effectuées les archéologues lors des fouilles ultérieures.
Les découvertes archéologiques
Les fouilles réalisées à l’intérieur de l’enceinte du parking ont en effet permis de mettre au jour des vestiges s’échelonnant de l’Antiquité (Ier et IIème siècle de notre ère) jusqu’à l’époque de construction du quai Fulchiron vers 1850.
Outre les vestiges des constructions médiévales à modernes implantées en berge de Saône, figurent une barque datant du XVIIIème siècle, neuf pirogues s’échelonnant de la période médiévale au XVIème siècle et six embarcations à fond plat datées des Ier ou IIème siècle après J-C, dont certaines ont été coupées par la paroi moulée ou les barrettes centrales du parking (voir photo n°3).
La présence de ces très grandes embarcations antiques (15 à 18m de long pour 2 à plus de 4m de large), dont quatre sont échouées les unes contre les autres, confirme qu’il y avait bien à cette époque et à cet emplacement un débarcadère qui permettait d’assurer un trafic de marchandises de grande envergure par voie fluviale.
L’existence d’une installation portuaire fut confirmée par la mise au jour par les archéologues d’un ponton constitué de pieux de bois fichés dans les sables alluvionnaires, associés à des poutres horizontales. En marge de ces prestigieuses découvertes, les archéologues ont par ailleurs mis au jour de nombreux témoignages de la vie passée de ce quartier, comme des milliers de fragments de céramique, des objets en bois, en cuir, en métal, des bijoux tel un camée en or, et des flotteurs de filets de pêche…
Quant aux barques, que vont-elles devenir ?
Malgré une emprise de chantier rendue étroite par le phasage nécessaire, malgré un gros encombrement en surface, mais aussi en profondeur, de par la présence de nombreux vestiges archéologiques dont l’importance ne pouvait pas être estimée avant les travaux, Spie Batignolles Fondations a su faire face aux difficultés en travaillant en étroite collaboration avec tous les intervenants, en mettant au service de tous sa capacité à s’adapter à tous types de situations et en faisant preuve une fois de plus d’une grande réactivité sur le terrain .
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